L'homme qui tua Liberty Valance || Teagan

_ Vous êtes un homme compliqué Monsieur De Vitto.

Le psychologue jeta un regard à son patient allongé devant lui sur le divan. L'homme ne sembla pas réagir tout de suite. Il attendait visiblement qu'on lui pose une vraie question. Le fait de dire que quelqu'un est compliqué est une affirmation, et les affirmations n'appelent pas une réponse dans la majorité des cas.

_ Comment vous définiriez votre personnalité en trois qualificatifs ?

Il prit du temps pour réfléchir.

_ Hum... sarcastique, précis, et...

Il hésita.

_ Désabusé

_ Pourquoi ces trois mots ?

_ Le premier parce que je dis vraiment toujours ce que je pense. Je me comporte comme un imbécile et la plupart du temps je fais souffrir les gens. Ce n'est pas toujours volontaire croyez moi mais j'imagine que c'est plus fort que moi. Quoique je n'ai jamais vraiment fait d'efforts pour m'amender. Hum... précis parce que je ne supporte pas l'approximation. Je n'aime pas le manichéisme, les raccourcis facile. Quand on prétend parler de quelque chose il faut le maitriser, sinon c'est être malhonnete.

_ C'est ce que vous mettez en pratique dans vos livres ? D'ailleurs... pourquoi ce choix de vie ?

_ Quand j'avais 6 ans, mon père s'est fait abbatre dans la rue... une balle dans le dos. Il était sortit acheter du lait pour que ma mère puisse faire un gateau. Il faisait n'importe quoi pour qu'elle soit heureuse. Enfin... les flics ont jamais trouvé le type qui a fait ça.

_ Vous étiez en colère ?

_ Pas contre les flics. Ils avaient fait ce qu'ils avaient put. Mais je me suis dit qu'il y avait une bonne raison, que peut être Dieu voulait me dire quelque chose.

_ D'entrer dans la police ?

_ C'est ce que j'ai trouvé de mieux à faire.

_ Alors pourquoi avoir donné votre démission ?

_ Un jour, j'ai comprit que mon coéquipier était mêlé à une affaire de drogue... jusqu'au cou on peut dire. Les flics vereux on croit toujours que c'est que dans les films, et surtout pas que ça peut être le type avec qui vous bossez tous les jours. Je crois que ça m'a un peu dégouté du métier. Alors je me suis tourné vers ce que je sais le mieux faire... parler de meurtres.

_ Et... pourquoi désabusé ?

_ Je l'ai toujours été depuis que mon père est mort je crois. Même me raccrocher à l'idée que Dieu l'avait décidé ça ne m'aidait pas.

_ Pourquoi Dieu ?

_ Je ne sais pas trop.

La question sembla le désarconner un peu mais il reprit contenance

_ Mes parents sont italiens, tous les deux. La religion fait partie de leur culture et de leur façon d'être. Ma mère est pieuse, et je crois que la pensée que Dieu avait décidé de rappeler mon père à lui la réconfortait. Les gens cherchent une raison... s'il n'ya pas de raisons à la vie et à la mort, à quoi ça sert de vivre ?

_ En effet. Une autre question. Vous êtes plutôt bel homme mais vous ne vous êtes jamais marié et vous n'avez pas de relations stables apparement. C'est à cause de votre... désillusion ?

_ Ca expliquerait bien certaines choses non ? A vrai dire je ne sais pas... peut être que c'est ça, la vanité de la vie, trop courte pour se créer des attaches. Pourtant j'ai acheté une maison, j'ai adopté un fils et un tas d'autres choses comme ça. Alors si c'était vraiment que mon inconscient me souffle de ne pas m'attacher, pourquoi j'aurais fait ça ?

_ Parlez moi de votre fils... un besoin de se rassurer ?

_ Les parents d'Alexis étaient des journalistes russes abattus par le KGB parce qu'ils avaient voulu dénoncer leurs pratiques. Ca serait plutôt un besoin de le rassurer lui, pas moi.

_ Mais vous aimez l'idée que vous êtes quelqu'un de bien

_ Non je m'en fous. C'est vrai... je ne vois pas ce que ça veut dire être quelqu'un de bien. Y'a des gens qui ne font pas de mauvaises actions dans leur vie, comme mes parents. ne rien faire de particulier veut il dire qu'ils sont des gens bien ? Vous pensez que si on leur donnait une opportunité d'être des héros ils la prendraient ou ils se replieraient dans leur confort douillet ? Je suis pas quelqu'un de bien... je suis quelqu'un c'est tout... et ça me suffit

_ Giulia passe moi le plat s'il te plait.

L'adolescante tandit le plat à son grand frère par dessus la table. Teagan se servit des pates et tandit le plat à un garçon blond qui le posa sur la table. Visiblement il était gêné par quelque chose La petite tablée présidée par Madame De Vitto mangeait en silence, le regard tourné vers la télé où un présentateur toute moumoute et cravate dehors donnait les principales informations de la journée.

_ Un tremblement de terre dans le nord du Bangladesh...

_ Les pauvres gens ! Comme s'ils avaient besoin de ça en plus !

Claudia De Vitto secoua la tête en fermant ses yeux noirs. Elle les rouvrit et les posa sur l'adolescent blond.

_ Danny n'hésite pas à te reservir. Tu es malade ? Je leur ai dit à la cantine de votre lycée qu'ils vous servaient des choses périmées ! C'est scandaleux de nourrir des enfants comme ça.

_ Non non madame je vais bien.

_ Alors mange ! Tu n'aime plus mes ravioli ?

_ Maman... Ca va. D'ailleurs, il faut qu'on parle de quelque chose

_ Quoi toi aussi tu n'aime plus mes ravioli ?

_ Au chapitre politique intérieure à présent, le premier ministre Tony Blair a fait savoir...

Et un petit silence inquiet. Giulia avait stoppé la course de sa fourchette devant sa bouche ouverte, ce qui lui donnait l'air d'une carpe, et Danny ne savait plus où se mettre.

_ Maman... Danny est pas vraiment mon meilleur ami

_ Ah bon et il est quoi alors ?

Madame De Vitto avait beau chercher, elle ne comprenait pas comment on pouvait qualifier quelqu'un que l'on connait depuis le primaire et que l'on invite à manger à la maison 2 soirs par semaine si ce n'était justement par le terme "meilleur ami".

_ Teagan c'est pas une bonne idée.

_ T'inquiete pas...

Il se tourna vers sa mère et prit une profonde inspiration avant de lacher la phrase fatale.

_ Danny est mon petit ami. Maman... je crois que j'aime les hommes. Enfin j'aime aussi les femmes c'est ça le problème.

Giulia, qui avait finalement décidé de mettre le ravioli dans sa bouche, manqua s'étouffer de rire devant la mine sérieuse de son frère. Claudia De Vitto regarda lentement Danny puis son fils, son regard noir et surpris passant de l'un à l'autre.

_ Ah bon et bien... Euh... d'accord. Tu... tu as de la sauce tomate sur le menton mon chaton.

Teagan mit un moment avant de comprendre la seconde phrase et d'essuyer son menton avec sa serviette. En fait, ça avait été plus facile à dire que ce qu'il avait prévu. Une fois qu'il s'était décidé et qu'il s'était lancé, c'était venu tout seul. Il regarda Danny avec un sourire, que le blond lui rendit, et il recommenca à manger. Du fait du soulagement, Danny se reservit 3 fois...